Recommandation biap 15/4 : Besoins des élèves/étudiants déficients auditifs en intégration

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Préambule :

La Charte sociale Européenne précise :

- droits des personnes handicapées – article 15 :

« Les personnes handicapées (enfants, adolescents et adultes) doivent trouver place dans des structures normales ; l'éducation et la formation doivent être organisées dans le cadre des filières ordinaires et ce n'est que si cela s'avère impossible qu'il faut recourir à des établissements spéciaux. Les cours dispensés dans des écoles spéciales et les programmes d'enseignement adaptés proposés dans les écoles ordinaires doivent être d'une qualité suffisante. »

- droits des enfants – article 17  :

« Le système éducatif doit en outre être à la fois accessible et efficace….. Pour être efficace, le système éducatif suppose par ailleurs l'existence d'un mécanisme permettant de vérifier le niveau et la qualité pédagogique de l'enseignement dispensé. »

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A) Besoins Généraux :

Le BIAP rappelle que le processus de scolarisation en milieu ordinaire doit prendre en compte les capacités de l’élève ou étudiant atteint de déficience auditive, la participation des familles et les possibilités d’accueil de l’équipe pédagogique. (Cfr recommandation 15/03)

Ce principe est général à toute situation d’intégration. Dans ce sens, le BIAP recommande que le projet de scolarisation en milieu ordinaire fasse l’objet d’une évaluation préalable des besoins propres à chacune des parties qui peuvent être concernées : l’élève, l’étudiant, les parents, l’établissement scolaire ou universitaire, les professionnels.

Ces besoins sont multiformes, particuliers et en lien avec l’histoire de l’élève/étudiant et de sa famille. Au fil du temps, ils pourront être réévalués et modifiés. Ils ne sont pas généralisables à toutes les situations et pourront conduire à une réorientation éventuelle. De plus, tout enfant sourd scolarisé en enseignement ordinaire, peut être amené à éprouver des problèmes d’identité ; des contacts avec des pairs sourds seront d’autant plus préconisés.

Le BIAP souligne que la mise en œuvre du projet doit prendre en compte les deux axes suivants :

  • celui centré sur l’élève/étudiant et sa famille
  • celui centré sur l’établissement scolaire ou universitaire et les structures de soutien. Il incombe à ces dernières de veiller à la complémentarité, à la convergence et à la cohérence des actions.

Le BIAP recommande aux différents pouvoirs politiques concernés de tenir compte de ces besoins lors de la rédaction de décrets relatifs à la scolarisation en milieu ordinaire d’élèves atteints de déficience auditive, y compris pour les étudiants fréquentant l’enseignement supérieur ou universitaire, ou toute autre forme d’enseignement non obligatoire. Il en va de même pour le financement du soutien à l’intégration (aides techniques et moyens humains).

B) Besoins spécifiques :

En complément de ce qui est préconisé dans la recommandation BIAP 15/03, des éléments spécifiques émergent pour ce qui concerne les élèves porteurs d’implant cochléaire ou présentant une déficience auditive moyenne ou encore un handicap associé.

1) Besoins spécifiques rencontrés dans le projet de scolarisation en milieu ordinaire d’un enfant porteur d’implant cochléaire :

Le parcours scolaire d’un enfant porteur d’implant cochléaire peut se différencier par rapport à celui d’un enfant porteur de prothèses conventionnelles.

Outre les particularités individuelles liées à l’âge d’implantation, la durée de privation sensorielle et l’histoire de sa surdité, l’intégration d’un enfant implanté peut déstabiliser le professionnel soit par une réelle incertitude vis-à-vis de l’évolution attendue soit au contraire par la manifestation de progrès très rapides.

Tous les partenaires de l’intégration doivent rester vigilants par rapport à certaines particularités :

  • L’enfant porteur d’implant reste un enfant déficient auditif, pouvant montrer des divergences entre ses capacités de réception sonore et de répétition des messages et le sens qu’il peut y apporter. L’enseignant et les autres professionnels sans formation particulière en surdité ou non sensibilisés risquent de  surévaluer ses compétences communicatives et linguistiques.

  • L’impact de la déficience auditive persiste par rapport aux apprentissages. Malgré la prépondérance du canal de l’audition dans les échanges, le canal visuel reste indispensable ; ceci souligne la nécessité de poursuivre les adaptations par l’enseignant et les professionnels (telles que celles mentionnées dans la recommandation 15.2)

La guidance parentale  garde ici toute sa valeur, particulièrement face à la nécessité de réfléchir au caractère clair et réaliste du projet d’intégration scolaire. Certains paramètres tels que le diagnostic de troubles associés, l’évolution de la structure familiale ou les conditions socioculturelles peuvent, malgré l’implant, mettre à mal le processus d’intégration.

2) Besoins spécifiques rencontrés dans le projet de scolarisation en milieu ordinaire d’un enfant atteint d’une déficience auditive moyenne :

Trop de surdités moyennes sont méconnues car masquées par des troubles secondaires du comportement, du développement langagier ou d’apprentissage scolaire, qui sont autant de causes potentielles d’errances diagnostiques (dysphasie, dyslexie, handicap mental, syndrome hyperkinétique, troubles attentionnels …). Le dépistage de la déficience auditive moyenne se doit d’être le plus précoce possible en précisant si nécessaire l’incidence de troubles associés (cf. recommandation 21-01).

Des bilans audiologiques seront régulièrement effectués pour détecter d’éventuelles fluctuations des seuils auditifs, voire une évolutivité de la surdité.

Tous les partenaires de l’intégration doivent être vigilants par rapport à la nécessité de :

  • Garantir le meilleur accès auditif aux informations dans toutes les situations pédagogiques (système FM, appareillage conventionnel …)

  • Avoir en mémoire que l’enfant malentendant peut leurrer l’interlocuteur par d’autres indices tels que visuels et contextuels, tout en n’ayant pas accès à l’entièreté du message. L’enfant et l’enseignant doivent développer des réponses adaptatives lors de moments critiques susceptibles de générer des ambiguïtés (échanges en groupe, dictées, cours magistraux donnés dans des locaux spacieux ainsi que la présence de bruits de fond).

  • Etre attentif à la possible confusion entre relative bonne audition et compréhension linguistique suffisante.

  • Se poser la question, dans l’élaboration du projet personnalisé, de la pertinence d’une aide à la communication demandant une formation et/ou un soutien spécifique dans la classe : reformulation orale, modalité orale avec aide à la lecture labiale, Français signé…

  • Accompagner l’enfant dans la construction de son identité.

3) Besoins spécifiques rencontrés dans le projet de scolarisation en milieu ordinaire d’un enfant atteint de déficience auditive avec handicaps associés :

Le but de l’intégration scolaire pour l’enfant déficient auditif avec handicaps associés est de favoriser le développement de sa socialisation en grand groupe, la communication avec autrui, l’accès à certains apprentissages et une plus grande autonomie.

L’intégration scolaire ne peut être envisageable pour tous. Il est important de ne pas leurrer les familles (cfr recommandation 25/03 – 21/04).

Une socialisation peut être envisagée dans un premier temps (jardins d’enfants spécialisés, crèches, haltes-garderies). Si l’évaluation des potentialités le permet, l’intégration est proposée dès l’âge préscolaire avec toutes les aides techniques, humaines voire animalières nécessaires à la mise en œuvre du projet.

Une évaluation la plus précise possible des outils (potentialités sensorielles, motrices, cognitives, de communication et de langage) dont dispose l’enfant est un préalable. La recommandation 21/01 fait apparaître la notion de quotient perceptif permettant l’apprentissage.

Cette évaluation des besoins spécifiques justifie l’intervention d’autres équipes spécialisées qui travailleront en complémentarité et en relation étroite avec l’équipe audiophonologique, la famille et la structure d’accueil. Elle permet de déterminer ce qui est nécessaire et raisonnable à mettre en place ainsi que les modalités de financement des aides et de leur pérennisation.

Les outils spécifiques de communication (moyens alternatifs ou augmentatifs tels que le Bliss, les pictogrammes ou les codes dérivés des signes) utilisés avec l’enfant dans le milieu familial doivent être également exploités dans le cadre scolaire.

Il est nécessaire de tenir compte des problèmes d’absentéisme liés aux bilans de contrôle ou aux éventuelles hospitalisations de durée variable. Dans ce cadre, il faut s’assurer de la continuité de l’action pédagogique par la création et l’intervention de structures ambulatoires.

Le processus d’intégration sera à remettre en cause, partiellement ou totalement :

- si les capacités cognitives ne s’avèrent pas suffisantes,

- si l’évolution de la pathologie le justifie

- si les contraintes de cette intégration sont telles qu’elles compromettent la qualité de vie de l’enfant, l’équilibre du milieu familial ou qu’elles touchent aux limites du milieu d’accueil.

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Cette recommandation est basée sur une collaboration multidisciplinaire :

Présidente de la commission : Biard Marie Christine (Belgique-Liban)

Membres de la commission : Chollet Marie Hélène (France), Leman Jacques (France), Martiat Benoît (Belgique), Pirson Sabine (Belgique) et Tarabbo Antoine (France)

Cette recommandation a été acceptée à l’assemblée générale du Biap de mai 2007 à Rhodes (Grèce).

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